La verrerie médiévale à Herbeumont

Moyen Âge

Le massif forestier entre Chiny et Herbeumont (province de Luxembourg) recèle de précieux vestiges. Un atelier de verrier médiéval y a été fouillé par G. Hossey qui a mis au jour plusieurs structures entre 1985 et 1991. Il est situé sur les pentes d’un vallon appelé Goutelle des Simognes au fond duquel coulent les eaux provenant d’une source toute proche. Un grand crassier implanté sur la pente constitue une plateforme. Il a été en partie exploré lors des premières campagnes de fouilles et a livré une riche moisson de débris de verre (5.500), de fragments de creusets, mais aussi de la céramique usuelle. La moitié du crassier avait cependant été épargnée. Le cœur de la verrerie est formé par un grand four de fusion de plan rectangulaire avec un canal de chauffe bordé de banquettes sur lesquelles étaient posés les creusets. Plus de 200 kg de ces récipients ont été récupérés sur l’ensemble du site.

Une autre structure maçonnée de plan circulaire a été découverte à quelques mètres de l’autre côté du crassier.
Sa fonction est malaisée à définir : four à pain, four de potier pour réaliser les nombreux creusets ?

(Mathieu & Fontaine, 2008). À ces structures s’ajoutent les traces d’un habitat sommaire et plusieurs aires de fauldes, fruits du travail de charbonniers. La récente publication du matériel en verre par C. Fontaine en 2010 a fait le point sur la typologie de l’ensemble de la production (Fontaine-Hodiamont & Hossey, 2010). Mais une série de questions restaient en suspens. Le mode de constitution du cône de déjection posait question. Était-il le résultat d’une lente accumulation ou de la construction homogène d’une plateforme ? Quelle était la durée de la production verrière ? Le matériel était-il homogène ? Était-il possible d’affiner la période d’occupation grâce à des précisions d’ordre stratigraphique ou céramologique ? Les aires de charbonnier étaient-elles liées à l’exploitation verrière ? La coupe réalisée dans les années 1980 a été rectifiée et une nouvelle bande large d’environ 1 mètre a été entièrement explorée et tamisée. Les résidus de production découverts dans les différentes couches du crassier sont tout à fait semblables à ceux découverts précédemment et toutes les formes typologiques sont présentes dans chaque strate. La forte inclinaison des couches, l’homogénéité du matériel en céramique et en verre semblent indiquer une édification rapide de la structure destinée à combler la pente naturelle du terrain afin d’aménager une plateforme utile à l’exploitation du site.

Mais la découverte la plus intéressante est une grande fosse au pied de la coupe antérieure au dépôt des remblais. Le mobilier archéologique renfermé dans cette structure close est identique à celui du crassier. Quelques informations nouvelles sont toutefois à signaler au niveau de la production. Certains décors pointillés réalisés à l’aide de moules ont ainsi été complétés. Plusieurs fragments de vitraux à décor de grisaille de type « cages à mouches » ont encore été repérés. Cependant, les traces de mastic sur le pourtour de plusieurs fragments permettent de considérer ces objets comme du groisil récupéré et apporté pour la refonte. Ces éléments anciens et caractéristiques du XIIIe siècle doivent être écartés de la production afin de ne pas fausser la datation de celle-ci. Les trois aires de fauldes de charbonniers présentes sur le site ont fait l’objet de sondages.

Elles sont clairement établies sur la couche d’épandage de résidus de la verrerie. Ces structures sont donc postérieures à l’époque médiévale tout comme celles qui parsèment les alentours. La fabrication du combustible devait être réalisée à proximité mais pas sur le site même de production. En fin de chantier, c’est en rebouchant le grand four de fusion que furent mis au jour les restes d’une structure circulaire qui pourrait peut-être correspondre à un four identique à un de ceux découverts précédemment. Dans l’impossibilité d’une fouille immédiate, il a également été enfoui pour protection en attendant de futures recherches. Il semble que la durée de l’occupation du site est également à relativiser. La découverte à 1,2 km des restes d’une autre installation semble plaider en faveur d’une verrerie dite « volante ». Plusieurs fragments de creusets caractéristiques et des fragments de structure arrachés d’un four ont été découverts à cet endroit. Il n’est pas à exclure que de nouvelles prospections révèlent d’autres vestiges de ce type dans cet énorme massif forestier. De
nombreuses installations temporaires de ce type ont été repérées en forêt vosgienne (Meyer, 2011). Les verriers épuisaient la ressource locale en bois avant de se déplacer. Les constructions légères y étaient privilégiées. Actuellement, les vestiges de ces zones artisanales se réduisent à quelques restes de fours, des plates-formes et à une zone de rebuts.

Sources :

L’ATELIER DE VERRIER D’HERBEUMONT ET LA PRODUCTION DE VERRES SOUFFLÉS-MOULÉS, XIVe-DÉBUT XVe SIÈCLE
Chantal Fontaine-Hodiamont* et Guido Hossey* (Page de 345 à 374 du pdf)

– Fontaine-Hodiamont C. & Hossey G., 2010. L’atelier de verrier d’Herbeumont et la production de verres soufflés-moulés, XIVe – début XVe siècle. In : Fontaine-Hodiamont C. (dir.), D’Ennion au Val Saint-Lambert. Le verre soufflé-moulé.
Actes des 23 èmes Rencontres de l’Association française pour l’Archéologie du Verre. Colloque international Bruxelles – Namur 17-19 octobre 2008, Bruxelles (Scientia Artis, 5), p. 345-374.
– Hossey G., 1991. Une verrerie médiévale à Herbeumont au XIVe siècle. In : Remy H. (dir.),
Archéologie en Ardenne de la Préhistoire au XVIIIe siècle, Bruxelles, Crédit communal, p. 229-234.
– Hossey G. & Thiry M., 1986. Une verrerie médiévale à Herbeumont, Archaeologia Belgica , II, 1, p. 143-144.
– Mathieu S. & Fontaine C., 2008. L’atelier de verrier d’Herbeumont et la production de verres soufflés-moulés(XIVe – début XVe siècle). In : Cappucci C. (coord.), Catalogue d’exposition
À bout de souffle. Le verre soufflé-moulé, des origines au Val Saint-Lambert, présenté à l’Espace archéologique Saint-Pierre à Namur du 26 septembre 2008 au 16 janvier 2009, p. 31-35.
– Meyer N., 2011. Les verreries forestières médiévales et modernes du massif vosgien (Moselle), Archéologie et usages du verre, Musée de la Cour d’Or, Metz, p. 83-86.

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